Une controverse n’existe jamais hors-sol, mais s’incarne dans des cadres
matériels. Souvent, les désaccords se manifestent dans des lieux
d’expression publique et les prises de parole ont des effets décisifs sur
la manière même dont se constituent les problématisations.
Forccast a expérimenté plusieurs manières de restituer des enquêtes de controverses, toujours dans des contextes de formation, sous une forme écrite ou orale, et s’est plus spécifiquement intéressé à la simulation orale de débats. Cette simulation cherche à représenter, par le jeu et de manière collective, l’analyse de controverses et le processus de l’enquête. Il existe bien sûr d’autres manières de les restituer, comme la création d’une œuvre, qu’elle soit sonore, cinématographique, poétique ou théâtrale.
Les restitutions orales favorisent la participation de tou·te·s. Cette immersion dans un environnement fictif a une fonction à la fois heuristique et esthétique : on y affine la compréhension des enjeux de la controverse et des points de vue qu’elle implique en les incorporant et en les performant. À ce titre, elles mettent en abyme, de manière originale, la controverse qui contient en elle-même une dimension de représentation puisqu’elle se définit aussi par sa « mise en scène devant un tiers ».
La simulation d’une controverse
Proche du jeu de rôles, exigeant des participant·e·s un engagement moral et
physique, la simulation forme à l’art du débat et de la négociation en
situation d’incertitude et fait ressentir l’enchevêtrement des situations.
Elle met à l’épreuve la maîtrise des argumentations et des preuves qui les
soutiennent. Elle aide à comprendre que les discussions restent impossibles à
clôturer, et les certitudes à s’imposer en l’état des connaissances. La circulation disputée de la parole et la dynamique d’action-réaction qui y préside viennent illustrer l’intensité et la densité de ces forums. En même temps qu’elle fait découvrir la variété des configurations sociales et politiques où se constituent les savoirs, elle apprend à s’emparer des outils de l’enquête pour imaginer des modèles alternatifs de décision collective.
La mise en scène que constitue une simulation nécessite de soigner la dramaturgie en amont, tout en laissant de l’espace aux acteur·rice·s pour improviser et créer des surprises. Au préalable, une réflexion sur les arènes de la controverse doit être menée. Bien que l’on essaie d’être le plus fidèle au terrain de l’enquête, des marges de manœuvre sont bien sûr envisageables pour en rendre compte : il est possible de « rejouer » une situation ayant déjà eu lieu en orientant les débats différemment ou d’ajouter des acteur·rice·s qui n’auraient pas été présent·e·s. L’essentiel est de maintenir la cohérence.
Dans les simulations qu’il a organisées, Forccast, à l’initiative de Nicolas Benvegnu, s’est toujours efforcé de multiplier les jeux d’échelles, les temporalités et les types d’arènes, rappelant que la démocratie se vit et se construit dans des lieux très divers et qu’elle ne se résume pas à aller voter à l’occasion. Les situations connues et repérées qui se font l’écho des controverses, comme les émissions télévisées, les assemblées parlementaires et les procès, ne sont pas celles que Forccast a privilégiées dans ses exercices de simulation. Par exemple, la configuration d’un procès se prête mal à la restitution de la complexité d’une controverse : sa méthode de confrontation peut figer la compréhension des enjeux, son verdict faire oublier qu’il est justement bien difficile de trancher dans le cas d’une controverse et, enfin, son régime de preuve peut différer de celui en vigueur dans la fabrication des faits scientifiques. Pour autant, il est intéressant de combiner dans une simulation des éléments propres à chacune de ces arènes, afin de mieux se rendre compte de la manière spécifique dont une controverse s’y déroule. La forme du talk show peut aider à mener une réflexion critique sur le régime médiatique contemporain : les médias ne sont pas de simples relais mais des acteurs avec leur propre cadrage du problème. L’exercice de la simulation est aussi l’occasion de déconstruire certaines catégories – il existe des médias et non les médias, des procédures judiciaires et non la justice, etc.
Tutoriel 1
Écrire le scénario d’une simulation
Le format d’une simulation se choisit en fonction du nombre de
participant·e·s, du temps et de l’espace impartis, des objectifs
pédagogiques et du thème de la controverse. Son écriture comporte deux
étapes : la scénarisation et la définition des acteur·rice·s ; la réalisation du kit de simulation.
Scénariser la simulation
Différentes étapes sont nécessaires pour écrire le scénario de la
simulation de la controverse :
- Constituer une base documentaire.
- Repérer les points de tension de la controverse et identifier les acteur·rice·s impliqué·e·s.
- Rédiger un tableau de programmation listant les enjeux sur lesquels les acteur·rice·s s’expriment, discutent ou se disputent. Ce tableau permet de déterminer les événements et d’identifier les arènes qui ponctuent la simulation.
- Associer à chaque séquence de la simulation un thème et des acteur·rice·s présent·e·s.
-
Lister les acteur·rice·s engagé·e·s dans la simulation et répartir les rôles en fonction du nombre de participant·e·s. Il n’est pas nécessaire de les faire correspondre exactement : ils peuvent être répartis en fonction de l’importance assignée à un rôle par la scénarisation.
Réaliser le kit d’accompagnement d’une simulation
Le kit qui accompagne les participant·e·s au cours de l’exercice se compose
de quatre éléments : les consignes, les fiches d’acteur·rice·s, les scripts
des rôles et les ressources documentaires.
-
Les consignes sont les recommandations permettant aux
participant·e·s de s’immerger dans la simulation. On peut y joindre
le tableau de programmation qui renseigne sur l’enchaînement et les
objectifs des séquences.
-
Les fiches d’acteur·rice·s décrivent les arguments et les intérêts
des parties prenantes de la controverse. Elles aident à comprendre
la position d’un·e acteur·rice.
-
Les scripts des rôles : ils sont différents des fiches d’acteur·rice·s. Ils ne comportent que les éléments pertinents pour interpréter un·e
acteur·rice selon le scénario de la simulation, soit la liste des
arènes dans lesquelles l’acteur·rice est présent·e, l’enjeu du
débat qui s’y déroule et les alliances possibles ou les stratégies
à adopter face aux adversaires.
-
Les ressources documentaires rassemblent des éléments pour
s’informer sur le sujet de la controverse (bibliographie, articles
scientifiques, rapports, entretiens, films, etc.).
Une brève typologie des simulations
Forccast a recouru principalement à trois types de simulation : les négociations diplomatiques, les débats publics et les cas de gouvernance. Il est possible de les combiner et, surtout, il importe de les enrichir par des enquêtes socio-logiques sur les acteur·rice·s impliqué·e·s, afin de pouvoir cerner finement les arguments et les rôles :
Forccast emmène plus loin que les simulations du Model United Nations (MUN) où il y a une forme et un code stricts que l’on peut se contenter de suivre tout en restant dans sa zone de confort. Il fallait avoir une connaissance plus ample du dossier et être beaucoup plus actif, ce qui permettait une plus grande liberté et créativité. […] Au niveau de la prise de conscience citoyenne, Forccast a été meilleur maître que le MUN. Étudier les aspects techniques du sujet faisait plus réfléchir et permettait de comprendre que nous avons, en tant que citoyens impliqués, le droit et le pouvoir de faire entendre notre voix.
Les négociations diplomatiques
Les simulations de négociations diplomatiques ont pour objectif principal de plonger les participant·e·s dans des processus de décision complexes, de leur faire éprouver la difficulté à représenter un enchevêtrement d’intérêts contradictoires – en l’occurrence un État ou une organisation supra-gouvernementale – et de les mesurer aux rapports de force qui sous-tendent les relations entre différentes parties prenantes – ici les délégations gouvernementales.
L’arène choisie pour ce type de simulation est généralement un sommet diplomatique, qui se décline en séances plénières et discussions informelles. Ces dernières sont réellement intégrées à la simulation, afin de sensibiliser les participant·e·s aux cercles de discussion en petit comité, caractéristiques des conférences onusiennes, qui se déroulent à l’abri des projecteurs et se révèlent souvent plus déterminants que les grandes assemblées à vaste résonance médiatique. Forccast a élargi ce type de simulations à d’autres acteur·rice·s, en conviant par exemple des représentant·e·s d’ONG ou de groupes privés, afin de mieux se représenter leurs rôles dans ces formes de gouvernance. De telles simulations ne cherchent pas nécessairement à conclure à un accord, car il n’est pas toujours possible d’arriver à une décision commune. L’« échec » fait alors partie du processus d’apprentissage.
Les débats publics
Un deuxième type de simulation prend la forme des débats publics. Il présente l’avantage d’explorer un paysage argumentatif et des registres d’expression variés grâce à la diversité des acteu·rice·s mobilisé·e·s : représentant·e·s du gouvernement, d’associations, de syndicats ou de collectifs liés à la controverse. Les débats se tiennent dans différentes arènes : ils suivent un protocole très formel, comme dans une audition parlementaire, ou se déroulent de manière libre, comme lors d’une réunion publique.
Les débats publics portent souvent sur des projets d’aménagement, plus ou moins contestés et défendus par des acteur·rice·s qui détiennent une expertise technique. La controverse se concentre sur la procédure démocratique d’adoption du projet et sur la légitimité de l’expertise en question : paradoxalement, même si les dispositifs d’information et de participation des citoyen·ne·s prévus par la loi sont souvent désertés, ils n’en sont pas moins fréquemment critiqués. La simulation permet alors de se demander si le passage par les procédures existantes suffit à asseoir la légitimité d’un projet dans un État de droit, ou s’il faudrait en inventer de nouvelles.
Même si le débat public simulé respecte la procédure réglementaire en la matière, il est possible d’y faire quelques entorses pour le bien de la scénarisation, par exemple sous la forme d’un happening concentrant en un espace-temps unique des événements qui, en réalité, ont eu lieu séparément. C’est l’occasion de prendre la mesure du timing réel des prises de décisions et de la composition d’une force d’opposition.
Les cas de gouvernance
Avec la prolifération des controverses scientifiques et techniques, les situations dans lesquelles la gestion d’une politique sectorielle ou d’un projet mobilise une pluralité d’acteur·rice·s et de sources d’expertise se sont multipliées. La simulation de cas de gouvernance a pour but d’appréhender la manière dont les compétences sont réparties entre acteur·rice·s et niveaux de décision, et de poser la question de leur efficacité. On y apprend à caractériser l’évolution des rapports entre public et privé, en expérimentant les tensions qui s’exercent entre le pouvoir des expert·e·s et la légitimité démocratique du politique. Il est aussi intéressant de prévoir, au cours de la simulation, des temps de discussion informelle pour souligner que les différents moments d’échanges ne sont pas hermétiques les uns par rapport aux autres, ou encore d’imaginer l’organisation d’une perturbation extérieure, comme une manifestation, pour signifier l’enchâssement des événements dans la fabrication d’un consensus.
Quel que soit le type de simulation, il importe de toujours ménager un temps de bilan, ou de « retours ». S’il n’est pas exhaustif, il permet de re-saisir collectivement ce qui a été formulé pour partager des impressions et, éventuellement, de pointer une incohérence ou de préciser des oublis – comme dans toute répétition de musique ou de théâtre. Il est par ailleurs envisageable de faire rejouer la simulation, dans son intégralité ou en partie, avec de nouvelles contraintes (changement des rôles, ajout d’une perturbation, ouverture par un argument spécifique) pour faire sentir aux participant·e·s l’importance du jeu.
Les techniques de l’art oratoire
La simulation d’une controverse requiert aussi tout un travail de
préparation : la mise en scène des débats et l’entraînement des
participant·e·s qui incarnent les acteur·rice·s de la controverse.
L’exercice est, en soi, une restitution vivante, qui possède des
contraintes propres, comme la vraisemblance de la situation et de
l’interprétation. La simulation parlée relève de l’art oratoire.
C’est pourquoi la préparation des participant·e·s doit inclure un temps
spécifique à la traduction orale de l’enquête écrite qui a servi à
documenter la simulation, et ce travail est loin d’aller de soi. La
simulation offre l’occasion d’éprouver l’éventail complet de l’art oratoire : c’est toute l’implication politique des usages de la parole qui
est engagée. Elle fait percevoir aux participant·e·s à quel point la maîtrise de l’argumentation est indispensable à l’exercice d’une pleine citoyenneté critique en démocratie.
Composition du discours
Passer d’un texte écrit (l’enquête) à un récit oral (la simulation) fait
gagner à la fois en contrainte et en liberté. À l’oral, il faut veiller à
ne pas perdre l’auditoire. La première tâche consiste donc à couper, à
réagencer et à transformer le texte écrit afin de le rendre vivant.
Selon la rhétorique classique, l’art oratoire puise dans trois sources principales, désignées en grec par logos, pathos et ethos : le logos est la parole
rationnelle, l’enchaînement logique des arguments visant à persuader
l’auditoire ; le pathos convoque l’émotion, établissant un autre
type de rapport entre l’orateur·rice et son public ; l’ethos
constitue le rappel aux valeurs partagées, mettant en avant les convictions
personnelles de l’orateur·rice.
Dans une simulation, il est essentiel de sensibiliser les participant·e·s
aux spécificités de l’art oratoire, afin qu’ils et elles s’approprient le
texte et trouvent un style qui leur convient. Il ne leur est demandé ni
d’apprendre le discours par cœur, ni de garder les yeux rivés sur leurs
notes : l’idéal est de trouver un juste milieu, c’est-à-dire de se fixer un
canevas, une structure qui laisse une marge d’improvisation.
Techniques corporelles de l’art oratoire
Les techniques corporelles de l’art oratoire ont pour objectif
d’intensifier la présence sur scène. Elles favorisent la conscience de soi
et de son corps et permettent de se situer dans un espace-temps précis,
celui du présent.
Être présent·e, c’est établir un contact avec l’auditoire, tout en restant
centré·e sur soi-même.
Tutoriel 2
Préparer son discours
L’interprète d’une simulation de controverses doit structurer son discours de façon simple en soignant tout spécialement le début de la prise de parole. Voici quelques questions à se poser : par quelle expression accrocher le public ? Faut-il l’interpeller directement ? Rappeler un fait connu ? Se livrer à un aveu personnel pour établir d’emblée une relation intime avec l’auditoire ? Ou encore à une captatio benevolentiae, une phrase qui demande son indulgence
?
La fin est elle aussi importante, car c’est la dernière impression qui reste
dans l’esprit des auditeur·rice·s. On peut avoir recours à des références
partagées : a-t-on envie que son discours se termine sur un accord majeur
ou mineur ? Est-ce une fin surprise ou une fin ouverte ?
Enfin, si le texte écrit se méfie des répétitions, le récit oral est
susceptible de s’en servir pour accompagner l’écoute, tout en veillant à ne
pas abuser de ce ressort.
La préparation collective peut démarrer avec des exercices en cercle afin de détendre l’atmosphère et de mettre chacun·e dans un état de disponibilité physique et mentale. Il faut ensuite prendre conscience de ses appuis, de sa démarche, de son ancrage au sol. On marche, on essaye de se stabiliser, de s’enraciner avec ses pieds, comme un arbre que les racines maintiennent au sol : une bonne prise de parole commence toujours par les pieds. On porte aussi l’attention sur la verticalité, sur sa propre silhouette, afin de se représenter l’espace occupé par son corps. Le regard est important, car c’est un outil à la fois passif (je reçois des informations sur l’espace dans lequel je me situe) et actif (j’apprends à orienter mon regard, sachant que le public m’écoute en regardant). Tous ces exercices aident à éprouver la dimension physique de la prise de parole.
Le travail d’interprétation
Si les techniques corporelles de l’art oratoire sont nécessaires pour se rendre audible et visible sur scène, la mise en scène de la simulation impose un travail d’interprétation : il ne suffit pas d’apprendre à s’exprimer, il faut surtout se mettre au service d’une représentation collective. Deux types de préparation aident à entrer dans la peau d’un personnage :
-
Les exercices qui développent l’imaginaire autour du personnage – sa vie, sa carrière, son entourage, ses valeurs. On peut par exemple poser des questions sur le mode de l’entretien, ce qui oblige l’interprète à improviser et l’habitue à incarner son personnage.
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Les exercices qui caractérisent physiquement le personnage : quel âge a-t-il ? Comment se tient-il, regarde-t-il, parle-t-il ? Il n’est pas question de jouer à l’imitation, mais de composer à sa façon une personne crédible puis d’effectuer un déplacement vers cet être depuis soi-même et son propre corps.
Tutoriel 3
Incarner un personnage
La forme de l’entretien, proposée ici comme un exercice ludique de
préparation à la simulation, permet de préciser le personnage et d’affiner
son rôle. Les autres participant·e·s l’interrogent : où habitez-vous ?
Avez-vous des enfants ? Quel est votre plat préféré ? Les réponses à ces questions anodines aident à se glisser dans la peau du personnage. L’improvisation permet de l’appréhender par l’imagination.
Composer physiquement le personnage nécessite d’expérimenter une gamme
d’attitudes afin d’affiner le jeu progressivement. Il est possible de
travailler avec des masques, ce qui a l’avantage de donner plus de relief à
l’attitude physique de l’interprète.
Si, par exemple, je dois tenir le rôle d’un·e médecin, je peux faire des
choix arbitraires qui aideront à mieux visualiser le sujet : décider que
ce·tte médecin a le regard très vif, qu’il ou elle parle rapidement, que
ses gestes sont secs ou nerveux, qu’il ou elle tient souvent un stylo entre
les doigts, etc.
Si l’acteur·rice que je défends s’est exprimé·e dans les médias, je peux
me servir de cette matière : podcasts, vidéos, entretiens, tout est utile
pour mieux saisir sa personnalité. La maire d’une petite commune pourra
être une personne passionnée, volcanique, dont le ton s’enflamme facilement
ou, au contraire, être posée, voire flegmatique. Ces traits de caractère
peuvent même aider à comprendre sa politique.
Tutoriel 4
Préparer sa grille d’improvisation
La simulation d’une controverse est toujours un saut dans l’inconnu en
raison de sa part inhérente d’improvisation qui fait pleinement partie de
l’exercice. Il faut donc la préparer au mieux, en répétant les débats qui
précisent les enjeux pour chaque acteur·rice et chaque arène. Travailler
en binôme aide le ou la participant·e à clarifier sa vision du personnage
qu’il ou elle incarne et celle de son adversaire : on pose des questions, on
précise ses arguments et on affine sa prose tout en étant à l’écoute de
l’autre.
Une erreur fréquente consiste à débattre en dehors du cadre. Cela ne veut
pas dire que la simulation doive éviter tout effet de surprise. Les controverses
suscitant souvent des méta-arguments, comme la contestation de la légitimité du processus décisionnel lui-même, des ruptures ou des happenings peuvent être intégrés au déroulé. Ils installent dans
la discussion technique une tonalité passionnée, souvent présente sur le
terrain. Le risque est, bien sûr, de glisser vers la confusion. Afin de
rendre le désordre constructif et audible, il est essentiel de
chorégraphier les interventions, d’anticiper des points de repère et de
sensibiliser à la vision d’ensemble.
L’articulation entre les personnages et la mise en scène
La simulation demande à l’interprète d’avoir conscience de son rôle et de
sa contribution à la fresque collective. Dans le cas d’une
controverse, il est vivement recommandé que soit précisé au préalable le
jeu d’alliances entre les différent·e·s acteur·rice·s afin d’éviter, une
fois dans le feu de l’action, que des acteur·rice·s a priori proches se perdent dans des controverses stériles.
Le ton employé revêt une importance cruciale et dépend de l’arène dans
laquelle on s’exprime. Il importe de sélectionner les contenus les plus
pertinents pour la session interprétée et la manière dont les règles
peuvent être transgressées. Les modérateur·rice·s du débat jouent un rôle
central : tel·le·s des metteur·se·s en scène, ils et elles ont une
connaissance complète des enjeux de la controverse et veillent au bon
déroulement de la simulation, à ce qu’elle reste dans le
sujet tout en étant dynamique et passionnante. Avant d’endosser ce rôle, il
leur faut prendre conscience de son importance et de sa difficulté.
Vincent Casanova et Luigi Cerri
Vincent Casanova est agrégé d’histoire, il enseigne au lycée Léon Blum de Créteil et coordonne un cours de cartographie des controverses en master à Sciences Po.
Luigi Cerri est comédien, auteur, metteur en scène et co-directeur du laboratoire Fabrique de Terriens. Il est docteur en économie politique.