publié par Equipe FORCCAST le 10 sept. 2018
Pour la première fois, Forccast a organisé une simulation pour les 170 nouveaux étudiants du campus de Menton de Sciences Po lors du stage de pré-rentrée 2018. L’expérience proposait d’explorer les controverses liées au dessalement de l’eau de mer au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MENA).
Depuis cinq ans, la semaine de pré-rentrée de Sciences Po constitue un temps fort de l’activité de Forccast, puisque le programme propose à cette occasion des expériences pédagogiques qui lient, analyse de controverses contemporaines et simulation de débat. Cela permet à des centaines d’étudiants tous les ans d’être initiés à quelques-uns des fondamentaux de la scolarité à Sciences Po. Sur le campus de Paris, les étudiants s’exercent à la prise de parole en public en puisant dans des dossiers thématiques préparés par l’équipe Forccast (égalité femmes-hommes, biocarburants, barrage de Sivens). Sur le campus de Reims, les nouveaux arrivants sont projetés depuis août 2017 au coeur d’un Sommet mondial sur le futur de l’alimentation.
La simulation proposée sur le campus de Sciences Po à Menton constituait la principale nouveauté de la pré-rentrée 2018. Isabel Ruck, chargée de mission spécialisée pour la simulation de débats et de négociations à Forccast, a conçu et organisé cette nouvelle simulation, dont le thème est à la croisée des préoccupations du programme d’innovation pédagogique et de la spécialisation géographique du campus de Menton : c’est à ce point de rencontre qu’est née cette simulation sur le dessalement de l’eau de mer au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MENA). Cette région est déjà l’une des plus arides au monde et le phénomène de stress hydrique s’amplifie avec le réchauffement climatique. Sous l’effet combiné d’une urbanisation croissante et de l’augmentation des standards de vie, plus coûteux en eau, la gestion de l’eau douce devient un enjeu crucial dans cette cette partie du monde. La ressource acquiert de ce fait le statut d’ « or bleu. » De nombreux pays se sont tournés vers la technique du dessalement de l’eau de mer pour répondre aux besoins de leurs populations. Mais la solution est controversée, notamment en raison des nombreux effets sur l’environnement, sur la santé, et sur les équilibres socio-économiques.
La simulation a mis les étudiants face à la complexité de la situation pendant deux jours.
Parmi la soixantaine de rôles que les élèves devaient incarner, aussi bien des ministres, des chefs d’entreprises que des représentants d’associations et des organisations internationales, certains étaient porteurs d’enjeux et de projets qui permettaient d’esquisser d’autres modèles de développement agricole, en cherchant par exemple à adapter l’agriculture à la ressource, ou en évitant la perte d’eau virtuelle (virtual water loss) par l’export de fruits et de légumes riches en eau, ce qui nécessite la mise en place de circuits courts et d’une économie plus circulaire et plus locale. D’autres, au contraire, voyaient dans le dessalement une solution avec une importante portée politique permettant de développer la « stratégie africaine » du Maroc.
Les étudiants avaient découvert le rôle qui leur était attribué le premier jour. Ils disposaient de peu de temps pour se familiariser avec l’acteur qu’ils incarnaient. Malgré cette contrainte temporelle, le résultat a été jugé stupéfiant par l’équipe pédagogique et par les participants eux-mêmes ! Ainsi, rapporte une étudiante, « c’est étonnant à quelle vitesse nous étions capables de nous approprier un rôle, à la fois sur la forme et sur le fond ». Le but de la simulation était d’immerger les étudiants dans des situations de la vie professionnelle où l’apprentissage se fait aussi au fil des rencontres et des interactions avec les autres acteurs, à la fois en face-à-face et sur les réseaux sociaux. En effet, l’organisatrice de l’événement avait pris soin de mettre en place un compte Twitter pour la simulation. « Cela a donné à la simulation un côté vraiment réaliste et interactif » a commenté un étudiant qui incarnait la chaîne de télévision marocaine, Al Aoula.
Plusieurs étudiants jouaient le rôle de journalistes de la presse écrite et de la télévision. leur activité a maintenu une pression constante sur les différents acteurs. Interviews à chaud, parution d’articles, débats médiatiques et d’autres reportages ont ponctué l’expérience tout au long de ces deux journées. Certains acteurs n’ont pas hésité à solliciter les journalistes pour faire entendre leur propre point de vue dans la presse, à l’instar de l’étudiant Mohamed R. Chekroud qui incarnait l’économiste marocain Najib Akesbi, connu pour ses positions critiques vis-à-vis la politique de développement durable du Royaume chérifien. Selon Mohamed R. Chekroud, l’exercice « nous a appris à nous comporter vraiment en acteur, à défendre nos intérêts et à penser aussi à la stratégie ». C’est en cela que la simulation est un moyen très complémentaire à la formation dispensée à Sciences Po. Dans la controverse du dessalement « il n’y a pas de bonne ou de mauvaise solution, il y a des avis qui divergent car ils se fondent sur des expertises différentes », a très bien résumé Ryan Tfaily, étudiant qui incarnait la start-up Sweetch.
Avec cette première expérience stimulante sur le campus de Sciences Po à Menton, Forccast poursuit ainsi l’essaimage de ses innovations pédagogiques. De nouvelles collaborations, sur de nouveaux sujets relatifs au monde méditerranéen, sont d’ores et déjà souhaitées avec les étudiants et l’équipe pédagogique de Menton. Bernard El-Ghoul, directeur du campus de Menton, a d’ores et déjà annoncé vouloir reconduire cette simulation à la pré-rentrée de 2019 !