Fictionnaliser une controverse, enseigner autrement. Interview de Valérie Beaudouin et Olivier Fournout

publié par Equipe FORCCAST le 25 mai 2016

catégories Controverses · Enseignement supérieur · fiction · Telecom Paristech

Au sein de Forccast, les partenaires expérimentent différents formats de cours. Du côté de Télécom Paristech, l’équipe pédagogique conjugue de manière originale les deux dimensions fondamentales du programme : l’analyse des controverses et l’incarnation des acteurs par la simulation ou la fictionnalisation. Nous avons rencontré Valérie Beaudouin et Olivier Fournout, enseignants du cours enjeux des TIC et analyse de controverses à Télécom, en charge de cette expérience charnière.

O. Fournout et V/ Baudouin

Bonjour à tous les deux, pouvez-vous nous dire comment vous êtes arrivés dans le cours sur les controverses à Télécom Paristech et quel y est votre rôle en tant qu’enseignant ?

Valérie Beaudouin Historiquement il y avait un cours Enjeux des TIC (“Enjeux des Technologies de l’Information et de la Communication”, dit aussi “ETIC”) qui avait été mis en place à Télécom Paristech dans le département des Sciences Économiques et Sociales en lien avec le département Informatique. Nicolas Auray a fait évoluer le cours pour le rapprocher des cours d’analyse des controverses qui avaient lieu à l’École des Mines et à SciencesPo. Dans ce cadre là, nous avons fait des cours ETIC classiques sur un vaste panel de sujets. Et puis il y a cinq ans, nous nous sommes dits que nous allions expérimenter une autre façon de donner ce cours. Auparavant, dans certaines soutenances, les élèves mettaient spontanément en scène de petits sketchs lors de la restitution. Nous avons senti que cela permettait de donner une vision beaucoup plus riche et en tension de la controverse. Nous avons alors introduit la possibilité de passer par la fiction pour rendre compte de la controverse, au lieu que les élèves aient à créer un site web.

Olivier Fournout Je crois que le point de départ, c’est que nous ici à Télécom nous avons depuis très longtemps une spécificité assez forte du côté de la mise en fiction/mise en théâtre des logiques sociales. C’est une méthode que j’ai développée auprès d’institutions très différentes. Nous travaillons sur ce type de pédagogies pour le Corps des Mines, pour l’Université Paris Dauphine, et bien entendu ici à Télécom Paristech, mais sur d’autres thématiques que les controverses. Le socle commun de ces interventions c’est que, premièrement, quel que soit le sujet, nous demandons systématiquement aux étudiants de faire un travail d’enquête, de description d’une situation et de formalisation d’un vécu lié à la thématique (par exemple les dynamiques de groupe, les enjeux managériaux, les relations sur internet). Ensuite, nous aidons et accompagnons les étudiants dans une transposition fictionnelle, traditionnellement la mise en théâtre, dont l’objectif est de refléter ce que l’on a étudié en terme de logique sociale et d’enjeux de société. Le deuxième invariant, c’est que les étudiants se mettent en situation de création collective, et doivent co-produire leur sketch, leur pièce, leur scénario. Nicolas Auray est venu nous trouver, Valérie et moi, parce que nous avions cette expérience de transposition des logiques sociales dans le champ fictionnel, pour l’appliquer au domaine des controverses dans le cadre du programme de recherche Forccast.

La fiction comme compte rendu d’une exploration de controverse, c’est une expérimentation atypique. Par quelles étapes êtes-vous passés ?

Valérie Beaudouin Nous avons testé différents formats de rendu ces dernières années. Nous avons commencé par la mise en théâtre. La première année nous avions deux sujets, le mariage pour tous, une controverse alors au coeur de l’actualité, et l’aéroport de Notre-Dame des Landes. La deuxième année, nous avons trouvé intéressant de faire travailler deux groupes sur un même sujet afin d’avoir deux rendus différents, les étudiants ont donc étudié la question “faut-il pénaliser les clients de la prostitution”. La troisième année nous avons innové avec un format de court-métrage vidéo. Ce désir de changement vient de cette énorme frustration de n’avoir qu’une représentation, dont nous ne gardions aucune trace. Le travail des étudiants n’était plus visible. Donc nous avons essayé le court métrage pour garder un support et mieux partager le travail des étudiants. Cette année nous avons décidé d’avoir trois formats différents : une mise en théâtre, un court métrage, et une performance poétique.Au fil des deux dernières années, nous avons aussi fait évoluer les sujets, en nous concentrant sur des questions de développement durable. Nous avons traité successivement les tragédies de l’anthropocène (en vidéo), les technologies sont-elles la solution au réchauffement climatique? (en performance poétique), et quelle agriculture pour nourrir dix milliards d’humains ? (en théâtre et vidéo).

Olivier Fournout Ici à Télécom il y a une vingtaine de groupes de huit étudiants de première année, qui traitent des sujets différents. Notre expérimentation concerne trois groupes sur les vingt. Chaque année nous essayons de prendre plus de groupes, mais nous ne sommes que deux enseignants permanents, garants de la méthodologie. A chaque fois nous travaillons en équipe avec des artistes spécialistes du format que nous avons choisi : un réalisateur pour les courts métrages, quelqu’un qui vient du théâtre ou qui fait de la performance poétique, afin de s’adjoindre des compétences supplémentaires. Ce que nous défendons ici, c’est que nous avons tous la double casquette “analyse de la controverse” et “transposition artistique”. Valérie est à la fois sociologue et membre de l’Oulipo, et quant à moi j’ai une longue pratique de la mise en scène et de l’écriture fictionnelle tout en étant chercheur en SHS. Donc, nous pouvons accompagner les étudiants sur les deux plans, et de même, les intervenants artistes sont choisis car ils sont capables de travailler aussi sur le fond de la controverse. Cela nous permettra à terme d’assumer individuellement un groupe, là où actuellement nous sommes un vivier de cinq personnes encadrant trois groupes. Une fois la phase d’expérimentation terminée, nous aurons acquis un socle commun et de bonnes pratiques.

Vous utilisez cette année trois formats différents, pourquoi ?

Olivier Fournout Pédagogiquement, il y a des avantages et des inconvénients à chaque format. Cette année, on introduit la performance poétique, et puisque nous utilisons aussi le théâtre et le court métrage vidéo, nous allons vraiment pouvoir faire une analyse critique des formats possibles.

Valérie Beaudouin Dans ce que nous avons vu jusqu’à maintenant, il y a une dimension improvisation dans le théâtre qui fait que le rendu fonctionne très bien. Dans le court métrage, les étudiants étaient moins en position d’improviser car les plans sont très courts, et nous n’avons pas réussi à avoir la même qualité de dialogue spontané dans la restitution finale.

Olivier Fournout C’est vrai que le court métrage est très appréciable car il laisse une trace que nous pouvons montrer après, alors que le théâtre filmé est toujours un peu pauvre par rapport au vécu de la représentation réelle. En revanche ce que nous allons tester aussi, notamment pour des articles de recherche, c’est que nous allons retranscrire les dialogues théâtraux dans un livret. J’ai l’intuition que ce sera un format assez plaisant et moins décevant que les images filmées du théâtre. Sur la vidéo, nous sommes encore en apprentissage. Autant la mise en théâtre, nous l’avons beaucoup testée via d’autres cours, auprès de différentes institutions, sur des thématiques variées, autant sur la vidéo nous sommes encore en train d’essayer d’améliorer le processus, pour donner plus de pouvoir aux étudiants, pour qu’ils puissent assumer leurs choix de forme, d’improvisation, de plan, de narration.

Valérie Beaudouin Il y a aussi un important détail pratique, c’est que cette année nous avons deux fois plus de temps pour réaliser le court métrage. L’an dernier nous avions vraiment été restreints par l’étroitesse du créneau temporel. Il n’y avait eu qu’un jour de tournage et un jour de montage par film.

Cela fait donc 4 ans que vous travaillez sur la mise en fiction des controverses, quels avantages et inconvénients en retirez-vous pour l’instant ?

Olivier Fournout Tu touches là le cœur de notre recherche. Nous sommes très militants sur le sujet, car nous pensons qu’il a beaucoup d’avantages. Cela ne veut pas dire que nous sommes en position critique dure vis à vis de ce qui est fait de manière classique. Nous faisons travailler les étudiants sur le fond des controverses, ils construisent l’arbre des débats, la cartographie des acteurs et des arguments. La mise en fiction est capable de représenter de manière extrêmement efficace des acteurs en train de s’affronter, c’est un mode de compte-rendu intéressant des logiques sociales. Ce compte rendu est réalisable sous la forme d’un site internet, mais pourquoi ne pas utiliser la fiction comme un instrument d’optique pour voir les logiques sociales ? C’est là notre idée première. Victor Hugo dit dans la préface de Cromwell “le théâtre est un point d’optique, tout ce qui existe dans le monde, dans l’histoire, dans la vie, dans l’homme, tout doit et peut s’y réfléchir.” Donc c’est vraiment l’idée qu’à travers la fiction nous parvenons à capter la richesse des débats qui ont lieu dans la société.

Valérie Beaudouin Une deuxième idée c’est que la fiction est un moyen de représenter ce qui est non représentable, en particulier les passions, les émotions, tout ce qui est irrationnel et qui n’apparaît pas dans les arbres de débat. Nous savons bien que la controverse est guidée par des conflits, des postures où la dimension passionnelle est très importante. Souvent, nous trouvons que les arbres de débats produits par nos étudiants sont comme aplatis, et il nous manque cette mise en tension dynamique dans la représentation.Le dernier point est qu’il y a une dimension temporelle dans la fiction qui nous permet de voir comment la controverse évolue. Comment, au fil des interactions, des échanges et des alliances entre les acteurs les postures et les positions bougent. C’est très important pour nous de ne pas montrer la controverse comme quelque chose d’aplati, mais comme quelque chose en mouvement et en transformation permanente. Le théâtre et la fiction nous aident à montrer la dialectique des controverses.

Olivier Fournout Sur ce point là, j’aimerais ajouter une citation de Bruno Latour tirée de Face à Gaïa : “Pour moi, seul le théâtre peut permettre d’explorer la gamme des passions correspondant aux enjeux contemporains. Si les questions écologiques par leur ampleur, leur ubiquité et leur durée sont au sens propre irreprésentables, alors c’est aux œuvres d’art qui sont toujours aussi des œuvres de pensée, d’essayer de les présenter à nouveau aux sens.”Les controverses sociales sont à un tel niveau de complexité, avec une temporalité passée et future parfois très longue, que les cartographies classiques ne vont en saisir qu’un aspect. Le théâtre ou la fiction peuvent compléter cette exploration. Grâce à cela, l’irreprésentable peut être perçu, entendu, vu. Par exemple, pour la controverse du mariage gay, la mise en théâtre a mis en avant que les homosexuels ne sont pas un bloc, mais qu’ils ont des positions diversifiées sur la controverse. Dans une même catégorie d’acteurs, il y a parfois des irréconciliables, et un même acteur peut ressentir une ambiguïté par rapport au sujet de la controverse. Le théâtre peut rendre tout cela avec finesse, par une simple réplique. Les grandes partitions en catégories d’acteurs ont tendance à gommer cela, à nous faire oublier qu’un même acteur n’a pas toujours les deux pieds dans la même case. L’art, à l’inverse, est très puissant pour monter les ambivalences, les paradoxes, les contradictions internes.

En créant une fiction basée sur leur étude, les étudiants de vos groupes s’engagent à explorer la controverse différemment. Que pensez-vous que cela leurs apporte ?

Valérie Beaudouin Cela demande beaucoup d’implication de la part des étudiants, mais ils sont extrêmement motivés par ce qu’il font. Par rapport aux étudiants qui font le cours ETIC “classique”, nous avons remarqué un niveau d’implication bien plus important. Ils réalisent le même travail d’enquête que les autres groupes ETIC, mais nous attendons beaucoup d’eux dans leur capacité à approfondir l’analyse de la controverse. L’un des nombreux avantages de la fictionnalisation c’est que nos étudiants sont tous amenés à jouer, à prendre une place dans la fiction. Du fait de cette situation, ils sont dans l’obligation d’aller creuser la controverse pour pouvoir alimenter leur rôle. Ils doivent se décentrer. La qualité de leur jeu et du sketch final est directement liée à la qualité de l’enquête qu’ils ont faite en amont. Tout le matériel d’enquête va vraiment nourrir l’écriture, les positions qu’ils vont occuper et la dynamique de la pièce.

Olivier Fournout Par rapport aux autres groupes du cours ETIC, nous rajoutons une quinzaine d’heures sur un weekend. Le côté fictionnalisation demande un travail supplémentaire de la part des étudiants dans le format actuel, ce qui n’était pas le cas des premiers groupes “théâtre”. La première année, nous avons travaillé le même nombre d’heures que les autres groupes ETIC classique, mais de manière beaucoup plus intensive, avec des rendus d’aussi bonne qualité. Donc augmenter la durée du travail n’améliore pas forcément la qualité. C’est peut-être indispensable pour le court métrage vidéo parce qu’il y a énormément de technique avec le tournage et le montage. Sur le théâtre, le génie de l’improvisation fait que l’on peut arriver à une représentation formidable à partir d’une simple trame dont tout n’est pas détaillé par écrit ni prévu d’avance.Quand une équipe d’étudiants présente sa cartographie, ils prennent la parole les uns après les autres. Ils ne sont pas obligés de s’écouter les uns les autres, car ils ont préparé leur oral et savent ce qu’ils vont dire. Tandis que dans une mise en théâtre improvisée, ils sont obligés de s’écouter mutuellement. S’ils ne s’écoutent pas, ils ne peuvent pas se répondre. Donc il y a un double décentrement, d’une part parce qu’ils endossent des rôles qui ne correspondent pas forcément à leurs propres positions, mais aussi parce qu’ils sont obligés d’écouter les arguments de l’autre pour pouvoir lui répondre de manière efficace.

Valérie Beaudouin L’année où nous avons travaillé sur le mariage pour tous, au printemps 2013 quand le débat a atteint son paroxysme, nous avons demandé aux étudiants pourquoi ils avaient choisi ce sujet et ce format. Ils nous ont répondu qu’ils venaient pour discuter de façon sereine de ce débat de société, parce qu’il y avait un niveau de conflictualité tellement grand qu’ils n’arrivaient plus à en parler à l’extérieur. Nous avions des élèves des deux positions, pour et contre, et ils les ont exprimées assez spontanément. Il y avait un engagement personnel, et par ce travail collectif de prise de rôle, de jeu et d’argumentation croisée, ils ont appris à s’écouter et à avoir un dialogue construit et apaisé. Certains ont même revu leurs positions, même si ce n’est pas le cas de tous, mais par le dialogue et l’interaction dans le jeu fictionnel, ils sont arrivés à mieux s’écouter et à interagir.

Olivier Fournout De plus, le public étudiant aime bien la forme du sketch théâtral ou de la vidéo. Cela leur fait relever le nez de l’ordinateur, plus que devant une présentation de site web. Le côté ludique du théâtre les interpelle.

Et pour vous, en tant qu’enseignant, qu’est-ce que cela change à votre méthode de pouvoir vous appuyer sur une étude complète ?

Olivier Fournout La perspective de devoir créer une fiction nous rend ultra sensible à tout ce que les étudiants amènent de concret avec leur enquête. Plus c’est concret, plus c’est sensible et donc transposable à la fiction. Par exemple, sur une thématique de développement durable, lorsqu’ils nous parlent de “potager urbain”, nous visualisons tout de suite un lieu, avec des personnes physiques, un décor, des habits, des outils, une ambiance… Nous avons déjà là une scène de théâtre. Plus l’analyse de fond de la controverse sera précise, concrète et sensible, plus ce matériel sera utilisable pour le sketch.

Valérie Beaudouin Dans tous les travaux d’analyse de controverses de Bruno Latour et Michel Callon, il y a une attention très forte aux interactions et aux associations qui se font sur le terrain, et il y a une proximité avec ce qui est fait au théâtre. Pour que ça marche au théâtre il faut arriver à rentrer dans le détail des jeux entre les acteurs, des arguments qu’ils mobilisent… Il y a une homologie entre le travail de recherche autour de la controverse et la manière dont nous écrivons une pièce ou un court métrage.

Olivier Fournout Quand les étudiants mettent en fiction leurs problématiques, ils inventent des rôles qui ne sont pas forcément dans la controverse, comme par exemple le narrateur. Nous pensons que ce sont des manières d’aborder de manière créative une controverse. En paraphrasant Frédérique Aït Touati, nous pourrions dire que, pour nous, la fictionnalisation est une matrice d’invention pour faire progresser la science des controverses (la citation complète est: “Les figures poétiques coperniciennes ont participé à la fabrication des nouveaux mondes de la fiction et de la science et ont fourni sans cesse de nouvelles matrices d’invention parce qu’elles furent, avant tout, des figures du mouvement”, in Contes de la Lune, Essai sur la fiction et la science modernes, Gallimard, 2011). Par exemple, sur la controverse du mariage pour tous, les étudiants ont inventé des enfants qui s’interrogeaient sur la sexualité des parents, sur ce qui se passait à l’Assemblée Nationale, sur les coups d’éclats dans la cour de récréation sur ces sujets. C’est quelque chose qui apporte énormément à la vision de la controverse, un peu comme le Candide de Voltaire ou les Persans de Montesquieu. Ce sont des narrateurs qui viennent, qui regardent la complexité du social, et qui le retranscrivent avec un oeil neuf. Cela nous ouvre des possibilités d’invention sur le fond même de la controverse. Et à la fin, ces enfants-narrateurs nous projetaient dans l’imaginaire de ce que seraient les familles du futur, via des dessins inventés, réalisés par eux. Non seulement le travail de fond était abouti, mais la forme qu’ils ont choisie pour leur fiction nous donnait une ouverture pour que chacun se questionne.La grande règle de base à ne jamais oublier, c’est que ce sont les étudiants qui sont décideurs. De fait, à la fin, la fiction qu’ils ont créée prend une valeur sociologique. Par exemple, les mots et les images qu’ils ont employées pour rendre compte du “mariage pour tous” reflètent leurs choix, inscrits dans l’époque. La valeur de représentation est d’autant plus grande que c’est quelque chose qui vient d’eux et non pas de nous, ni sur le fond ni sur la forme. Une des pistes de recherche que nous avons est d’analyser les sketchs que nos élèves ont produits. Nous essayons de comprendre ce que la représentation qu’ils ont choisie révèle du contexte social actuel.

Quels conseils et quelle référence donneriez-vous à d’autres formateurs intéressés par votre formule de cours ?

Olivier Fournout Nous avons déjà écrit des articles sur la mise en théâtre des logiques sociales (notamment P. Corten-Gualtieri, O. Fournout, et al. “Des étudiants réalisent un sketch théâtral ou un clip vidéo pour faire évoluer leurs préconceptions“, dans Questions de Pédagogie dans l’Enseignement Supérieur, 2011, et S. Bouchet et O. Fournout, 2016, “La mise en théâtre de problématiques managériales“, Économie et Management, n°161, Réseau Canopé). Maintenant, notre priorité est de formaliser notre méthode appliquée à l’analyse des controverses scientifiques et sociétales. Les articles sont un bon moyen pour capitaliser sur une pratique, mais aussi le partage d’expériences, notamment avec ce qui se fait au Micro-lycée dans le cadre de Forccast, qui est passionnant et qui a de nombreuses parentés avec ce que nous faisons. Pourquoi pas aussi par de nouvelles co-animations qui sont une excellente manière de se former et d’innover encore.Nous pourrions intégrer d’autres personnes, dans d’autres cours, d’autres établissements, d’autres programmes, notamment internationaux. Un défi est de trouver des encadrants ayant ce potentiel de profil à “double casquette” (artistique et scientifique), pouvant, à terme, encadrer les élèves à la fois dans leur processus d’enquête et de création d’une fiction.

Valérie Beaudouin Nous tenons beaucoup à ce que les étudiants soient autonomes et réalisent eux-mêmes leur mise en scène. Nous sommes là pour les accompagner et non pas pour faire les choses à leur place. De même, ce sont les élèves qui vont analyser la controverse et non pas l’enseignant. Ce sont eux qui sont décideurs et nous ne pouvons pas nous substituer à eux. La difficulté pour nous, enseignants ou artistes, est de renoncer à la posture de celui qui sait ou qui fait la mise en scène. Nous assumons pleinement cette posture de maître ignorant telle que la définit Rancière, nous les accompagnons dans leurs propres cheminements.